Fort de mon expérience de plusieurs années au dépôt du TGI de Paris, je me fends d'un petit #Thread pour expliquer comment le brigadier-chef Amar Benmohamed aurait dû gérer la situation. 1/
Imaginons le scénario suivant :
Le gardien de la paix Lazarre, en poste à la ronde, et fort de son aura d'ancien (il est titulaire), est tranquillement en train de raconter des blagues racistes à ses collègues 2/
Soudain, un bruit strident vient gâcher la chute de la blague des arabes et du triathlon : le déféré de la cellule 144 a sonné. 3/
Oui, au dépôt, les déférés sonnent les flics, comme au Ritz les milliardaires sonnent les loufiats.

Je ne vous cache pas que c'est assez humilant.

Le Gpx Lazarre est fou de rage. Il monte au premier niveau, esquive un rat, et arrive devant la cellule du malotru. 4/
Ce dernier réclame du papier toilette.
Le Gpx Lazarre lui rétorque que les n***** ne sont bons qu'à se torcher avec les mains ( bon on peut imaginer autre chose, hein...). 5/
Au même instant, quelques mètres plus bas, le B/C Benmohamed passe dans le hall. Il entend les mots employés par le Gpx Lazarre, et est outré.
Il attend que l'agent soit redescendu, l'engueule, et lui demande son nom. 6/
Le Gpx Lazarre s'exécute, tout en arrosant son froc d'une bonne pinte de pisse tiède (vu l'odeur ambiante, ça ne se remarque pas).
Le B/C Benmohamed va ensuite dans le bureau des gradés où se trouve le major G., supérieur direct du Gpx Lazarre. 7/
Il lui dit : "Écoutez major, je viens de surprendre votre effectif etc...c'est inadmissible etc...j'écris."
Le major G. fait venir son agent, et lui dit : "Fiston, je crois que tu t'es mis dans la merde, tu ferais mieux d'écrire aussi." 8/
Le B/C Benmohamed rédige donc un rapport. Il y évite les propos rapportés, les dénonciations vagues, et fait dans le factuel : "Ce jour à telle heure à tel endroit tel effectif tels termes." Pas besoin de faire 4 pages. 9/
Il y rappelle les obligations d'exemplarite et d'impartialité qui s'appliquent aux policiers, ainsi que l'intérêt de ne pas énerver les déférés.
(50 mecs qui tapent sur une porte à coups de godasse, c'est marrant 5 minutes mais pas plus) 10/
Le rapport de ce gradé arrive sur le bureau de son N+1, le coordinateur nuit, qui transmet avec un "Vu" et sa signature à l'échelon suivant, le chef de service.
Celui-ci va voir le secrétariat, et demande si Lazarre a écrit un rapport. Oui, lui dit-on. 11/
Le chef de service joint les deux rapports, les agrafe à un bordereau de transmission, sur lequel il écrit dans sa case : "Propos inadmissibles, ouverture d'une enquête administrative".
Puis il transmet à la division, qui transmettra à la sous-direction et ainsi de suite 12/
Quelques jours plus tard, Lazarre est auditionné par le chef de service. Deux options s'offrent à lui :
-nier en bloc, mais comme Benmohamed a été très précis (suivez, dans le fond), les chances de succès ne dépassent pas les 5%,
-baisser son froc. Repentir sincère.
13/
Dans les deux cas, il s'en prendra une sévère. Ce qui fera réfléchir les autres (il y a peu de secrets dans un service).
Ça ne l'empêchera sûrement pas d'avoir des idées racistes, mais à l'avenir il s'y reprendra à deux fois avant de les exprimer. 14/
Maintenant, les considérations personnelles. L'un des arguments présentés par les défenseurs de M. Benmohamed, c'est que les effectifs mis en cause n'étaient pas placés sous son autorité directe. 15/
Sauf qu'ici, il ne s'agissait pas de leur donner un ordre, mais de leur rappeler l'application de règles, au même titre que la tenue soignée par exemple. J'ajoute qu'un B/C, qui a de surcroît de l'ancienneté, au dépôt, a toute légitimité pour reprendre un Gpx. 16/
Il est inconcevable qu'un gradé, constatant des comportements déviants, fasse le canard devant les effectifs pour écrire en loucedé quand ils ont le dos tourné. Alors certes y avait une F/B dans le lot, mais ça ne veut plus dire que ça voulait dire à une époque. 17/
Benmohamed, il avait fait chef de poste au périph, adjoint au chef de salle au CIC Circu, il était tout à fait capable de mettre un tir à quelques bitos. Au-dessus, il y avait un officier qui avait fait la CGE, et par conséquent peu enclin à tolérer des petits cons. 18/
En résumé cette histoire est un immense gâchis. Certes, il y a eu une caguade sur l'article 40. Perso je ne pense pas à une dissimulation, mais à un malentendu entre PP et IGPN, l'une et l'autre ayant dû croire que la saisine viendrait de l'autre côté. 19/
Mais si dès le début on avait eu du concret, des dates, des noms, on aurait pu établir des actes. Avoir de la matière. Mettre la pression.
La hiérarchie de la CGZA n'a eu que des faits fantômes. L'IGPN aussi.
Vous vous rendez compte que pas un seul fait n'est daté? 20/
C'est un miracle que certains aient avoué. Quand les accusations sont précises, comme dans le thread, tu es pris en étau, mais quand elles sont vagues, tu peux nier.
L'enquête judiciaire, j'en suis sûr, ne donnera rien de fameux. 21/
Ah, on me dit dans l'oreillette que ce récit n'accorde pas assez d'importance au volet pénal. Qu'à cela ne tienne. 22/ https://twitter.com/pairIDF/status/1288970210972700672?s=19
Benmohamed, il est quoi? OPJ. Autant dire qu'au dépôt, ça ne confère guère de responsabilités en plus, même la réquisition SOS Médecins, c'est généralement le commissaire de permanence qui la signe. 23/
Benmohamed, dans son rapport, prévient qu'il avisera le proc. À la fin de son service, il se rend à la section P12. Où on lui dit que ce n'est pas de leur ressort, et de s'adresser plutôt à P20. Ou à AC4.
24/
J'espère pour lui que c'est AC4 parce que P20 c'était sous les combles, putain fallait crapahuter... 25/
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